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Des ponts et des merveilles


Les ponts entre toi et moi en ont inspiré plus d’un ce mois-ci. 11 textes ont été proposés par les Scribtonautes et ensuite soumis au vote. Le vote fut plus serré que jamais! Trois textes ont terminé ex-æquo ! Sans plus attendre, voici les textes choisis par les membres qui ont d’abord lu chacun des textes proposés.

 

Je resterai Par Cannac

Vous savez à quel point c'est dur de se voir mourir ? Ca l'est d'autant plus quand ce sont les autres qui l'ont décidé. Bon c'est vrai, je suis un peu rouillé, mais quand même, je tiens debout, je me sens encore solide, peut-être pas comme dans ma jeunesse, mais bon sang, on veut me faire passer pour un vieux débris ! Le plus dur reste d'entendre toutes ces discussions à mon sujet. On veut m'isoler. Et puis un beau matin arrive un arrêté municipal, les gens ne peuvent plus me fréquenter. On m'abandonne, je deviens un paria, ils disent que je représente un danger... Moi blesser quelqu'un ? Après tout ce que j'ai vécu ! Il manquerait plus qu'on m’euthanasie, ça serait le comble... Par chance on me laisse mourir paisiblement, là où je suis, et ça c'est uniquement parce que j'ai une histoire. Pas comme l'autre d'en face... Ah ça oui, il est solide, il est utile, de bons matériaux et ouvriers, Eiffage qu'ils s'appelaient, ils ont fait leur travail et on ne les a plus jamais revus. Moi au moins j'ai été bâti par les personnes qui voulaient m'utiliser, il y avait du cœur à l'ouvrage. Sur moi les gens ne faisaient pas que passer, ils s'arrêtaient, discutaient, réfléchissaient, regardaient le paysage, prenaient des photos, échangeaient des souvenirs, des sentiments... J'en ai vu des choses, j'en ai entendu des histoires, du jeune couple qui vient profiter de la sérénité de l'endroit jusqu'à celui qui n'en a plus pour longtemps mais qui s'accroche à sa balade dominicale. Les enfants qui venaient sauter dans l'eau l'été ont grandi, c'était il y a longtemps, avant qu'on interdise de plonger. Aujourd'hui certains sont morts, d'autres partis, à l'image de cette rivière qui se réduit d'année en année. Tant mieux, je n'y verrai plus mon reflet. Il me reste encore ce je-ne-sais-quoi, cette authenticité que celui d'en face n'a pas... Qu'est-ce qu'il est moche, tout lisse et droit, le genre qu'on peut remplacer, oublier. Moi, je resterai encore, je suis dans les archives de la ville, j'ai des chansons à mon nom, j'ai eu plusieurs jeunesses, j'ai vécu la guerre moi. Les détonations à quelques mètres, je les ai ressenties, l'assaut ennemi, j'y ai résisté, j'ai plié sans céder, et après ça, au lieu de me remplacer, on m'a réparé. Je suis resté. Immobile mais pas sans histoires le vieux. C'est pour ça qu'on me laisse, ici; je fais partie du paysage, cerné par ces barrières que les plus confiants franchissent, ils savent que je ne m'écroulerai pas. Je resterai. Dans les chansons, dans les poèmes. Je resterai. Dans les photos, les images. Je resterai, dans les mémoires, les discussions. Je resterai, éparpillé au gré des crues, emporté pièce par pièce. Je resterai, dans les souvenirs du pont d'en face, pour qu'il sache qu'avant les gens s'arrêtaient sur moi, et c'est ce que je lui souhaite, de devenir la destination et non la route. J'aurais aimé lui raconter, mais on ne m'a pas construit de bouche.

 

Hommage Par farf42

Pont d’ocre L’obscurité. Tout autour. La cime des arbres. En bas Venu tant de fois Toujours seul. La délivrance. Ce soir. Lointains souvenirs Journée ensoleillée Toi et ton sourire. Peu m'importe Jambes dans le vide Hésitation. Vertiges. Néant. Ta gorge nouée Lys blanc Larmes retenues Silence *** Marchant dans tes pas Sur ce pont qui t’a vu pour la dernière fois Un regard vers le bas et la haine m’envahit J’ai pensé à sauter moi aussi J’ai dormi avec ton pull, pleuré encore Ecrit une chanson et posé des accords Colère coulant dans mes veines Puis mis un voile sur ma peine A Andrea (1989-2006)

 

Le pont de mon oubli Par Miaous

A vous deux, qu'encore aujourd'hui, je vois à mes côtés.

Un pas, un regard, un sourire Suffirent à nous unir, Pour un instant, pour une vie. La mienne. Car la tienne est partie. Il ne reste plus rien de nos moments, Que ceux que tu as gravés en moi, De tes mots, de tes gestes, si simplement. Mille fois, j'ai rêvé que tu sois là, Pour une minute de chahut, Sur ce pont de tristesse, Comme entre nous suspendu, A mon cri de détresse. Mille fois j'ai voulu dessiner Ce voile, cette toile, cette poussière, Autour de moi. Une étoffe de misère. J'ai tout donné pour oublier. Rien n'y fait, sans toi je ne suis plus, Qu'une étoile de surplus. Combien de fois j'ai pensé, Depuis ce pont à me jeter, Pour te rejoindre et peut-être, te retrouver. Dis-moi combien de temps Je devrai te regarder partir. Dis-moi comment Je pourrai à nouveau sourire. C'est encore là, comme chaque jour, A chaque instant, chaque détour. C'est un silence entre toi et moi, C'est ce secret qui nous unit Que je touche du bout des doigts. C'est ton absence qui me détruit.

 

Il va sans dire que ces textes regorgent de sentiments inspirés de la vraie vie. Impossible de ne pas être touché par ces écrits. Même Cannac, avec son originalité, réussit à nous émouvoir avec son vieux pont. Inutile maintenant de chercher à comprendre pourquoi le vote fut si serré...

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