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Comme un fou va jeter à la mer


Les Scribtonautes ont déserté le forum cet été, petits boulots, vacances au soleil ou simples moments détentes, seuls quelques irréductibles ont donc participé au défi du mois d'Août :

" Une bouteille échouée sur la plage".

Parmi eux, Calegal, notre Scribtonaute fantôme est réapparu suffisamment longtemps pour remporter le vote coup de cœur de ses collègues. Laissez vous emporter au fil de son texte .

 

Comme un fou va jeter à la mer

 

L’Océan se déchaîne autour de la frêle embarcation qui lutte pour rester à la surface. L’esquif est ballotté par les flots maltraitant sa coque. Les petits hommes s’activent sur le pont qu’ils tentent de vider avec des paniers percés. Les vagues joueuses s’amusent à faire rouler les marins qui vont s’écraser contre les caisses remplies de sardines. Celles-ci frétillent d’impatience à l’idée de retrouver leur liberté. Le malheur des uns fait le sauvetage des autres. Quelques matelots des plus courageux hurlent des défis à l’irascible Océan et perdent immanquablement leur aquatique duel. D’autres appellent à la pitié d’un dieu à l’abri dans ces nuages noirs. Enfin, les derniers semblent accepter leur sort et se jettent les bras ouverts dans ce qui deviendra leur liquide sépulture. L’Océan s’abreuve de ce pitoyable spectacle tout en envoyant de nouveaux soldats à l’assaut du navire qui continue de s’accrocher à la surface mouvante. La cristalline armée s’emploie à détruire méticuleusement tout ce qui se trouve sur le pont défiguré. Les hommes ne sont plus que des corps liquides rejoignant leur poissonneux tombeau. Seul le capitaine de ce bout de bois s’agrippe encore à son gouvernail, se battant contre l’invincible ennemi. « La mer sera bonne et généreuse aujourd’hui » avaient affirmé les vieux du village, eux qui rarement se trompent. Mais rarement n’est pas jamais. Toutes dents dehors, l’homme sourit à celle qui fut sa plus fidèle amie durant son humide vie. Lui qui était né sur le rafiot de son père allait finir avalé par sa raison de vivre. Tout ce qui est liquidien redevient liquidien. L’infatigable Océan continuait d’envahir le bateau plaintif sur le point de se suicider. Le capitaine ne tentait même plus de diriger le gouvernail qui semblait animé de sa propre existence. Alors pour la première et dernière fois, il abandonna les commandes de son navire. Il tâta sa poche arrière et en sortit son testament. Une belle bouteille en verre rouge donnée par sa femme il y a de ça cinq ans. « J’espère que tu n’auras jamais à t’en servir », avait-elle susurré. Aujourd’hui il s’en servirait. Il la remplit d’amour, de tendresse et de souvenirs avant d’y glisser son alliance. Puis il l’offrit à la plaine liquide en l’accompagnant d’une dernière pensée pour sa femme enceinte. Et l’Océan comprit qu’il pouvait prendre cet homme comme compagnon de jeu. Alors une vague plus haute que toutes les autres se leva des tréfonds des eaux et attrapa l’embarcation dans son aqueuse poigne. Le capitaine, gencives aux vents, s’en alla rejoindre l’Océan.

***

— Mamie ! Mamie ! Viens voir ce que j’ai trouvé ! hurla un petit bonhomme surexcité, tenant dans sa pogne une bouteille ensablée. La femme, au visage taillé par le temps et l’attente, saisit le vaisseau de verre et le contempla de longs instants. Une larme salée, une larme d’Océan, coula sur ses joues et vint s’écraser sur ce fragment de passé, laissant une trace sur le sable et dans le cœur.

 

Questions à l'auteur : Calegal

 

Comment t'es venu l'idée du texte de ce texte ?

L’idée a vraiment mis du temps à venir. En fait ce sont des brides de phrases qui me sont d’abord arrivées. J’avais envie d’écrire pour écrire, c’est à dire essayer de faire un texte qui se concentre sur la forme et non pas sur le fond. Donc l’idée est venue après les phrases en fait. D’où ce manque d’originalité (rires).


As-tu des anecdotes à son sujet, t'es tu inspiré de quelque chose en particulier pour l'écrire ?


Pas vraiment si ce n’est de l’imaginaire collectif d’un petit rafiot qui lutte contre le méchant Océan.


Quand on te dit Bouteille à la mer à quoi penses tu en premier ?


A la chanson de Balavoine d’où j’ai tiré le titre (Tous les cris les SOS) et au désespoir qui se dégage des paroles et de tout message jeté à la mer.

 

Retrouvez également le second texte coup de coeur de ce mois d'août : À la dérive, par notre Scribtonaute québecoise AliArt !

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