Fiche Thématique : la Femme Fatale
“De toute façon, l'homme n'est jamais gagnant dans le duel sexuel. La femme lui est "fatale".”
(De Jean Delumeau / La Peur en Occident)
La femme fatale
Héroïne, espionne, grande méchante, effrontée ou langoureuse, la femme fatale apparaît dans des dizaines d’ouvrages, de films, et dans l’imaginaire de nombre d’entre nous. Pour l’appel à texte de Nutty Sheep, certains d’entre nous se lancent à la poursuite de ces concentrés de clichés qui, bien loin de se laisser dicter leurs histoires par l’écrivain, forgent elles-mêmes leur destin sur les pages de nos traitements de texte.
Mais alors, qu’est-ce qu’une femme fatale ?
« Une femme fatale est un personnage type qui utilise le pouvoir de la sexualité pour piéger le héros malchanceux. La femme fatale est généralement décrite comme une femme sexuellement insatiable. »
(wikipedia)
Chacun à sa définition de ce personnage.
Vue par les Scribtonautes : Si vous demandez à un nain, il vous répondra : « Des seins. » Crachant le clown pas drôle qu’il a dans la gorge, il enchaîne : « Je dirais une femme qui est manipulatrice pour arriver à ses fins ? Plus par la sournoiserie et l'esprit que par la force brute. Sinon, on dit que c'est une femme forte. Mais sans dire qu'elle est grosse. » La fin de l’intervention sera censurée. Adressez-vous à Thorim pour en savoir plus. Maanilee estime qu'il lui faut du sexe, quant à Cess, elle rajoute qu'il s'agit d'un personnage féminin, avec de belles formes plantureuses, à qui l'on a rajouté des flingues et des centaines de morts. Ah non, correction : des centaines de mecs morts. Interrogeons maintenant un professionnel : Ian Fleming, auteur des bien connues James Bond girls. Les Fleming girls présentent, à travers leurs caractères propres, de nombreux points communs :
leur âge : entre 20 et 30 ans
leur beauté : de beaux visages, des peaux bronzées ou remarquablement pâles, de belles formes, une manière masculine de se comporter
leur érotisme : elles sont souvent peu vêtues
leur indépendance : contrairement aux femmes de la bonne société des années 1950, elles ne restent pas au foyer mais travaillent pour la plupart
un nom à double sens, évoquant leur attrait sexuel : des sages Kissy (de kiss : « baiser » en anglais) et Mary Goodnight (« bonne nuit » en anglais), aux plus osés Honey Rider (suggérant qu'elle aime chevaucher) et Pussy Galore, qu'on peut traduire par « minou à gogo » en argot anglo-saxon.
leur passage éphémère dans la vie de Bond : un seul roman, puis de très rares allusions dans les suivants, même pour la seule Madame Bond, qui ne survit pas au jour de ses noces.
Fleming décrit sa conception de la James Bond girl parfaite dans son quatrième roman :
« La femme idéale doit savoir faire la sauce béarnaise aussi bien que l'amour. Il faut aussi qu'elle soit douée de tous les petits talents de société habituels. Des cheveux d'or. Des yeux gris. Une bouche à damner un saint. Un corps parfait. Et naturellement un grand sens de l'humour, de l'élégance, et une dextérité convenable aux cartes. Il attend d'elle, encore, qu'elle ne commette pas d'erreur de parfums comme la plupart des Anglaises. Qu'elle sache s'habiller : il adore les robes noires surtout sur une peau bronzée, pas trop de bijoux et des ongles exempts de vernis. »
Ian Fleming, Les diamants sont éternels
Dans une autre littérature, la Marquise de Merteuil, femme d'une grande beauté, manipulatrice et orgueilleuse, est une libertine dans l'âme, et dit ceci :
« Je suis sûre que si j'avais le bon esprit de le quitter à présent, il en serait au désespoir ; et rien ne m'amuse comme un désespoir amoureux. Il m'appellerait perfide, et ce mot de perfide m'a toujours fait plaisir ; c'est, après celui de cruelle, le plus doux à l'oreille d'une femme. »
Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos.
Je pense pour ma part que, quel que soit son objectif, une femme fatale l’atteint. Et si elle doit surpasser un homme pour cela, ça n'en est que plus drôle. Physiquement irréprochable, ses manières fourbes, sensuelles et immorales font parfois d’elle une anti-héroïne. On aime ou non son caractère bien tranché. Plus intéressant encore, si l'on se penche pour creuser sous la surface, sans s'arrêter à sa peau ou ses agissements, demandons-nous :
Pourquoi une femme devient-elle fatale ?