COUP DE COEUR DE MAI: LE REMEDE PAR GAYA TAMERON
En ce mois de mai, joli, joli. Le thème des « parfums empoisonnés » a beaucoup inspiré les scribtonautes qui en ont proposé des interprétations très variées.
Le cœur des votants s’est tourné vers le remède de Gaya Tameron que je vous laisse découvrir.
Kommodor leva un flacon aux reflets ambrés et admira l’envoûtant spectacle qui se jouait dans son laboratoire. Le bouchon en liège cotoyait les effluves qui serpentaient entre les parois de verre. Sous le regard ébloui du vieil homme, des créatures fantastiques se succédaient. Licorne, dragon, golem, sirène et chupacabra coexistaient dans ce vase clos. L’enchanteur résista à l’envie de les libérer. D’une main fébrile, il rangea le précieux flacon dans une poche de son long manteau. Ses longs doigts osseux se refermèrent autour d’une canne incrustée de pierres et de dents aiguisées.
Une fois sa capuche rabattue sur sa crinière argentée, Kommodor se dirigea vers la sortie à petits pas. Dépassant une vitrine de fioles et son bureau d’études, le vieil homme éprouva la solennité du moment. Le battant refermé derrière lui, il embrassa du regard la colline qui se dressait à quelques dizaines de mètres. Surplombant la vallée en contrebas, elle donnait une vue imprenable sur les villages alentours. Depuis cet endroit élevé, l’enchanteur ferait ce qui devait être fait. Son existence solitaire n’empêchait pas le vieil homme de constater combien la cruauté s’étendait peu à peu. Grâce à cette solution, il pourrait mettre un terme à cette montée du mal. Ses recherches prenaient enfin tout leur sens.
D’un pas déterminé, Kommodor, aidé de son étrange canne, grimpa tout en haut de la colline. Arrivé à destination, il fouilla dans sa poche et en sortit le flacon aux reflets dorés.
Les yeux fermés, l’enchanteur retira le bouchon en liège, sachant qu’une fois ouvert, le processus serait en marche. Tel un nuage doué d’une volonté propre, il dévala la pente de l’autre côté, dansant avec majesté. Kommodor le suivit du regard, plein d’espoir. Sans odeur et invisible pour le commun des mortels, ce parfum empoisonné changerait la face du monde en moins de soixante-douze heures.
L’auteur a bien voulu se prêter au jeu des questions :
Est ce que l’image du sorcier est venue tout de suite ?
C’est « Parfums empoisonnés » qui m’a d’abord inspiré cette solution qui mettrait fin au mal radical. Puis, en commençant l’écriture du texte, l’image du sorcier s’est peu à peu imposée. Pour avoir plus d’impact, cette préparation devait être l’objet d’attentions de son créateur, un vieil homme qui chercherait comment empêcher le genre humain de se détruire.
D’ou vient ce Kommodor ?
Cela provient du « komondor », un chien de grande taille, rare en France. De la famille des bergers, il protège les troupeaux. La sonorité du mot en lui-même me plaisait, aussi en ai-je fait un prénom en changeant une lettre. Dans le texte, Kommodor est à la fois observateur et protecteur de l’humanité. Il ne peut rester passif devant l’escalade du mal.
Quels sont les ingrédients de ce remède ?
Rien que des essences positives : des larmes de dragon, quelques notes du chant d’une sirène, des éclats de rire d’un enfant et le parfum d’une rose blanche. C’est un parfum empoisonné, dans le sens où il va contrarier l’esprit et le cœur de tous ceux qui vont le respirer.
Quelle est la place des odeurs et des parfums dans tes textes ?
À vrai dire, je joue le plus souvent sur les odeurs quand deux personnages se rapprochent l’un de l’autre. Ou bien lorsqu’un individu découvre un nouveau lieu. De plus en plus, grâce aux Scribtonautes, je saisis l’importance de faire appel à tous les sens du lecteur pour mieux l’immerger dans l’histoire.
Quelles odeurs choisirais tu sur le réveil olfactif pour bien commencer la journée ?
Je dirais : thé vert à la menthe, brioche et confiture à la mûre.
Qu’ont apporté les commentaires des scribtonautes à propos de ce texte ?
Au départ, il s’intitulait « La solution finale » et certains y ont vu quelque chose de très négatif. C’est juste. Grâce aux commentaires que j’ai reçu, il m’est apparu que « Le remède » laissait davantage la surprise sur la teneur des intentions de Kommodor. Ils m’ont aidé à l’épurer de phrases en trop, à traquer quelques erreurs, et surtout l’enthousiasme de certains m’a fait très plaisir. Je pense même écrire une suite.